OPiCitations

Œuvre "Cahiers 1957 – 1972" : 25 résultats (sur 3396 citations)

quotation

1er octobre. Toute idée est une exagération. Penser, c’est exagérer.

rancune

Celui qui m’assure ignorer la rancune, j’ai toujours la tentation de lui donner une gifle, pour lui montrer qu’il se trompe.

quotation

  Dire qu’il y a des gens qui s’accordent le droit de vous ennuyer pendant trois heures d’affilée !
  La peur d’importuner, au vrai de ne pouvoir distraire les autres, fait que je ne peux rendre visite à personne, – à moins d’un grand effort sur moi.

prévoyance

En jugeant sans pitié ses contemporains, on risque d’avoir raison et de faire aux yeux de la postérité figure d’esprit incisif et clairvoyant.

religion

« et les derniers seront les premiers ».
Cette promesse à elle seule suffirait à expliquer la fortune du christianisme.

travail

Il est curieux qu’ayant les convictions que j’ai, j’arrive à tirer du plaisir de mon travail (quand je travaille !). Il n’y a que le travail qui nous fasse oublier l’essentiel, c’est-à-dire ce à quoi il ne faut pas penser si on veut entreprendre quelque chose et laisser des traces.
  Le travail – divine obnubilation !
  Si je pouvais oublier tout ce que je sais !

Dieu

Il faut penser à Dieu, et non à la religion, à l’extase, et non à la mystique. La différence entre le théoricien de la religion et le croyant est aussi grande qu’entre le psychiatre et le fou.

quotation

Il fut un temps où, me croyant l’être le plus normal qui fut jamais, je pris peur, et passai tout un hiver à lire des bouquins de psychiatrie.

humilité

— J’ai le sentiment du néant, mais je n’ai pas d’humilité. Le sentiment du néant est le contraire de l’humilité.
— N’est pas humble celui qui se hait.

idée

Je n’ai jamais émis d’idées, j’ai toujours été possédé par elles. Quand je crois en concevoir une, c’est elle qui me tient et m’asservit.

quotation

J’essaie, depuis quelques jours, de voir ce que l’idée de surhomme veut bien vouloir dire. Eh bien, plus je m’efforce d’en préciser le sens, plus je trouve qu’elle n’en possède aucun. C’est une idée plus puérile que délirante. Ou plutôt une grande idée pour adolescents ou pour la populace. Il y a tout un côté pénible chez Nietzsche, qui tient en grande partie à son excès de génie et à son manque de maturité, au fait qu’il n’a pas eu le temps de vieillir, je veux dire de connaître le désabusement, le dégoût du serein.

justice

La justice est, littérairement, un idéal médiocre.

conscience

  La seule chose que j’ai jamais comprise à fond : le drame de la conscience. Être conscient est un drame qui se termine avec la mort. Du moins, espérons-le…

définitif

Le commentateur s’en donne à cœur joie, lui qui aime à combler les lacunes, les intervalles entre les « pensées » ou maximes ; et à divaguer impunément ; il peut sans grand risque construire une figure à sa guise. Car ce qu’il aime lui, c’est l’arbitraire, qui lui donne l’illusion de la liberté et de l’invention : c’est de la rigueur à bon marché.

qualité

Le secret d’une habilité réside dans un défaut plus ou moins clandestin.

destin

Le succès n’appelle pas forcément le succès ; mais l’échec appelle toujours l’échec. Destin est un mot qui n’a de sens que dans le malheur.

liberté

On ne demande pas la liberté, mais l’illusion de liberté. C’est pour cette raison que l’humanité se démène depuis des millénaires.
Du reste la liberté étant, comme on a dit, une sensation, quelle différence y a-t-il entre être libre et se croire libre ?

honte

On oublie toutes les douleurs ; mais on n’oublie aucune humiliation.

écriture

  Pour un écrivain, il est préférable d’écrire sans rien dire que de lire. L’écriture est un exercice, la lecture ne l’est pas.
  (Ich habe mich… totgelesen.)
  Écrire une carte postale se rapproche plus d’une activité que lire la Phénoménologie de l’esprit.
  Une phrase de notre façon exige la mise en œuvre de toutes nos facultés ; il suffit d’un peu d’attention pour parcourir un texte.
  Les grands lecteurs sont des voluptueux, des paresseux, des abouliques, tout bonnemenent des gens qui fuient la responsabilité.
[…]
  (Je me suis tué à lire.)
[…]

individu

Quelqu’un a dit très bien qu’« exister, c’est être distinct ». – On cesse d’exister dans tout régime, religieux ou politique, qui supprime l’hérésie, la volonté d’aller contre le dogme ou le courant.

action

Si Dieu pouvait imaginer quel poids représente pour moi le moindre acte, il succomberait à la miséricorde ou me céderait sa place. Car mes impossibilités ont quelque chose d’infiniment vil et de divin tout ensemble. On ne peut être moins fait pour la terre que je ne suis. J’appartiens à un autre monde, autant dire que je suis d’un sous-monde. Un crachat du diable, voilà de quoi je suis pétri. Et pourtant, et pourtant !

qualité

Son manque de talent frisait le génie…

quotation

  Tout ce que j’ai de bon vient de ma paresse ; sans elle, qui m’aurait empêché de mettre en application mes mauvais desseins ? Elle m’a heureusement contenu dans les limites de la « vertu ».
  Tous nos vices viennent de l’excès d’activité, de cette propension à nous réaliser, à donner une apparence honorable à nos travers.

travail

  Tout ce que l’homme fait m’apparaît artificiel et inutile. L’animal seul trouve grâce à mes yeux. Quelle absurdité que ce singe qui va au bureau ! Se confiner dans une chambre se mettre à sa table de travail, y rester pendant des heures, – non, la dernière des bêtes est plus près de la vérité que l’homme.
  Et quand je pense à cette race maudite de fonctionnaires qui emploient leurs journées à s’occuper de choses qui ne les regardent pas, qui n’ont rien de commun avec leurs soucis ou leur être même ! Personne, dans la vie moderne, ne fait ce qu’il devrait faire, ce qu’il aimerait faire surtout. Et quand je pense aussi que le paysan est en voie de disparition ! Décidément, rien ne pourra jamais me réconcilier avec l’avenir de l’homme.

savoir

Un jour l’homme abolira le savoir et le pouvoir, il y renoncera, ou alors en mourra.