science

  Mais nous n’avons encore envisagé qu’un des côtés de la question. Le savant n’étudie pas la nature parce que cela est utile ; il l’étudie parce qu’il y prend plaisir et il y prend plaisir parce qu’elle est belle. Si la nature n’était pas belle, elle ne vaudrait pas la peine d’être connue, la vie ne vaudrait pas la peine d’être vécue. Je ne parle pas ici, bien entendu, de cette beauté qui frappe les sens, de la beauté des qualités et des apparences ; non que j’en fasse fi, loin de là, mais elle n’a rien à faire avec la science ; je veux parler de cette beauté plus intime qui vient de l’ordre harmonieux des parties, et qu’une intelligence pure peut saisir. C’est elle qui donne un corps, un squelette pour ainsi dire aux chatoyantes apparences qui flattent nos sens, et sans ce support, la beauté de ces rêves fugitifs ne serait qu’imparfaite parce qu’elle serait indécise et toujours fuyante. Au contraire, la beauté intellectuelle se suffit à elle-même et c’est pour elle, plus peut-être que pour le bien futur de l’humanité, que le savant se condamne à de longs et pénibles travaux.