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  C’est la signature de l’ère technique et anthropotechnique : les êtres humains se retrouvent de plus en plus sur la face active ou subjective de la sélection, sans qu’ils se soient volontairement forcés à entrer dans le rôle du sélecteur. On peut en outre l’affirmer : il existe un malaise dans le pouvoir de choisir, et ce sera bientôt une option possible de l’innocence, lorsque les hommes se refuseront explicitement à exercer le pouvoir de sélection qu’ils ont conquis dans les faits. Mais dès qu’ils évoluent positivement dans un champ de puissances de savoir, les hommes font mauvaise figure lorsque ils veulent laisser agir à leur place une puissance supérieure, qu’il s’agisse du dieu, du hasard ou des autres – comme dans le passé, du temps de leur incapacité. Comme une simple attitude de refus ou de démission paraît condamnée à l’échec en raison de sa stérilité, on en viendra sans doute, à l’avenir, à entrer dans le jeu de manière active et à formuler un code des anthropotechniques. Un tel code transformerait aussi, rétroactivement, la signification de l’humanisme classique – car il révélerait et consignerait le fait, que l’humanitas ne contient pas seulement l’amitié de l’homme avec l’homme – et, de manière toujours plus explicite – que l’homme représente pour l’homme une vis major – une force plus forte que lui-même.
  Nietzsche avait à l’esprit une partie de cette idée lorsqu’il osa se désigner lui-même comme une force majeure.